Paradoxal ? Alors que l’économie tourne au ralenti, la consommation d’électricité en cette première moitié de 2012 continue de marquer une hausse très importante et nous en faisions état dans nos colonnes, il y a un mois. A l’issue des six premiers mois, la croissance a été de 10,5% selon l’office national de l’électricité (ONE). Cette croissance est due à la fois à l’industrie (haute et moyenne tensions) et aux ménages (basse tension) qui ont progressé presque au même rythme : +9,8% et 10,7% respectivement.
Ce niveau de hausse de la demande remet au goût du jour la question de la capacité du système électrique marocain à y répondre de façon normale. Rappelons-le, il y a encore quelques années (2008), ce sujet était érigé en priorité nationale, car le décalage entre l’offre et la demande commençait à poser problème. D’où la mise en place en 2008 d’un «plan national d’actions prioritaires» articulé autour d’actions visant à la fois à renforcer le parc existant (investissements dans de nouvelles installations) et à inciter les usagers à maîtriser leur consommation (bonus en cas de baisse, usage des lampes basse consommation).
En 2010, l’hydroélectricité a représenté près de 16% de l’électricité consommée
Avec la mise en service, au début de 2012, de la centrale de Kénitra d’une capacité de 300 MW et fonctionnant au fioul, la capacité installée totale du pays est aujourd’hui de 6 677 MW. Il est important toutefois de signaler que dans cet ensemble, il y a des puissances installées que l’on pourrait qualifier de…théoriques.
C’est le cas des usines hydrauliques qui, avec 1 306 MW, représentent 19,6% de la capacité totale. D’ailleurs, l’ONE prend toujours soin de préciser, à propos de la puissance installée des usines hydrauliques, que les valeurs indiquées sont liées aux niveaux des retenues d’eau ; en d’autres mots, on ne dispose réellement des 1 306 MW que si les retenues d’eau sont à leur maximum.
Ce qui n’est pas toujours le cas, bien au contraire ; le Maroc étant un pays plutôt semi-aride. Dans l’hydraulique, l’autre élément dont il faut tenir compte, c’est l’irrigation. Ainsi, le turbinage pour produire de l’électricité est, dans une certaine mesure, tributaire des besoins en irrigation. Cela dit, partout dans le monde, la production d’énergie hydroélectrique est toujours inférieure à ce que suggère le niveau de la capacité installée.
En 2011, par exemple, la part de l’hydraulique dans la production d’électricité au Maroc n’était que de 8,78%, contre 15,89% en 2010, année au cours de laquelle les précipitations ont été abondantes. La même observation vaut pour l’éolien : il y a aujourd’hui 255 MW installée mais cette puissance n’est atteinte que lorsque le vent est à sa cote maximale.
Sur 15 676 GWh injectés dans le réseau à fin juin, 2 692 GWh ont été achetés grâce à l'interconnexion. Le recours aux importations, autrefois utilisé pour pallier les déficits, sert aujourd'hui à faire des arbitrages économiques : on achète moins cher qu'au coût d'une production locale.
Compte tenu de cette situation, comment la demande est-elle satisfaite ? Par le passé, on s’en souvient, le décalage entre l’offre et la demande se «réglait» à coup de délestages. Puis, le parc de production a commencé à se renforcer fin 1990/début 2000 et surtout une interconnexion avec l’Espagne (voir encadré), doublée plus tard, a été construite en 1997 qui permettra par la suite des échanges simultanés en cas de besoins (surtout dans le sens Espagne-Maroc).
Une autosuffisance pour quand ?
L’interconnexion avec l’Espagne peut être considérée comme une bouée de sauvetage pour le système électrique marocain. Elle permet d’accéder au marché spot espagnol pour acheter des kilowatt-heures lorsque ceux-ci sont à moindre coût.
C’est l’utilisation économiquement avantageuse de l’interconnexion. Hormis ce cas de figure, elle est utilisée également pour secourir le système local de production lorsque celui-ci ne peut pas, pour diverses raisons, répondre à la totalité de la demande exprimée. Conçu à l’origine pour jouer un rôle d’arbitrage économique afin de réduire le coût du kWh, l’interconnexion a surtout servi pendant longtemps à combler les déficits locaux.
Est-ce toujours le cas ? Une chose est certaine : ces dernière années, les volumes importés d’électricité ont augmenté chaque année, à l’exception de l’année 2010 ; ils représentent aujourd’hui 17% de l’énergie totale injectée dans le réseau. En 2011, la facture de l’électricité importée s’est élevée à 2,9 milliards de DH, en hausse de 56,6% par rapport à l’exercice 2010, selon les indications du ministère de l’énergie et des mines (voir graphe).
Dans la mesure où le Maroc importe la totalité des combustibles servant à la production d’électricité (sauf le gaz naturel qu’il reçoit comme contrepartie du passage, sur son territoire, du gazoduc Magheb-Europe), l’importation d’électricité, quand elle répond à des considérations de coût, peut s’avérer comme une opportunité à saisir pour alléger le fardeau de la facture énergétique globale. Il reste que, au-delà des questions de coûts, forcément importantes, l’électricité est tellement stratégique qu’une…autosuffisance s’impose.
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